Not all those who wander are lost* (mais parfois un peu quand meme)
*Tout ceux qui errent ne sont pas perdus (J.R.R. Tolkien – Le Seigneur des Anneaux)
« Puissant bastion de glace et de neige, la chaîne du Mont Arrowsmith est une formidable barrière qui s’élève entre le bassin du lac Heron et les Alpes du Sud, dans le centre de Canterbury .
La chaîne et les vallées sont élevées, stériles, balayées par le vent et dépourvues de couverture forestière importante – archétype d’un paysage de haute montagne. De petits glaciers remplissent des cirques isolés, alimentant les tussacks et et les lits caillouteux des rivières.
Splendide paysage montagneux. »
Cet extrait du magazine Wilderness était suffisamment vendeur pour que la destination soit sur notre liste de randonnées du week-end.
La météo s’annonçant clémente, nous prenons la route samedi matin vers le lac Héron (et pas Tapon).
Pour vous donner une idée, voilà un petit détail du menu de nos deux jours de randonnée (à part un morceau de fromage et quelques graines, il n’est rien resté ! On commence à être bien rodé sur les proportions. A part pour la polenta où j’ai du me planter de graduation, il y’en avait pour toute une armée. On a tout mangé quand même :p)
Le drôle de fruit vert, c’est un feijoa. En ce moment, je me goinfre de ça et de fruits de la passion, c’est trop bon et Victor n’aime pas, donc c’est tout pour moi !!
Samedi matin donc, direction le lac Héron (…et pas Tapon) sous quelques averses.
Nous testons les talents de 4×4 de Titine sur une piste chaotique pour rejoindre le semblant de parking au départ du sentier. Nous sommes tout de suite prévenus : ce n’est pas une « tramping track » mais une « route », ce qui signifie – contrairement à ce que notre maitrise de la langue française pourrait nous laisser croire- qu’il va falloir être capable de repérer le chemin et la direction nous-même. Nous avons une carte et un descriptif, et l’idée est de suivre la Cameron River jusqu’à sa source, donc peu de chance de se perdre. Il y a également un « intention book » où nous signalons l’itinéraire que nous avons prévu. Nous apprenons que deux autres personnes sont devant nous. Avec neuf places dans le refuge, pas de souci ! Ce chemin est hors des sentiers battus (au sens figuré et au sens propre, comme nous le découvrirons rapidement) et c’est également une base d’alpinisme car depuis le refuge, de nombreux pics et glaciers sont accessibles.
Nous nous mettons en route vers 11h30. Un peu plus de 15km et cinq heures de marche annoncées, le timing est bon ! Assez vite, nous scrutons attentivement les flancs de la vallée pour ne pas rater la montée sur une terrasse, évoquée dans notre descriptif. Cela nous amène à nous fourvoyer assez rapidement dans un entrelacs de buissons épineux et nous arrivons à la sage conclusion que nous ferions mieux de retourner vers le lit de la rivière. Comment perdre du temps et de l’énergie en une étape… Revenus au pied de la rivière, nous suivons un semblant de chemin dans les herbes hautes et mouillées. La pluie du matin est passée, mais les entrelacs de végétation qui nous arrivent à mi cuisse ont tôt fait de nous tremper pantalon et chaussures. Néanmoins le temps semble plutôt suivre les prédictions météo et les nuages se déchirent par moment, révélant au loin des pics enneigés.
Dès le début d’après-midi, il fait grand beau temps, nous marchons en t-shirt, pas mal pour un milieu d’automne ! La vallée de la Cameron River est très belle et les premières neiges de la saison sur les sommets ne gâchent rien.
La randonnée est cependant fatigante car, bien que le dénivelé soit assez faible, le terrain est inégal : lit rocailleux, buissons d’épines, espèce de cactus (renommées picpic) horribles qui nous trouent la peau (sérieusement, ces trucs sont affreusement vicieux et font vachement mal ! Au moment où tu t’y attends le moins et où tu essayes de freiner sur une pente grâce à un tussock, paf, tu fous la main, ou la jambe, ou les fesses en plein dedans). Notre marche est donc régulièrement agrémentée de AAIIIEUUUU sonores, et autres jurons moins classes…
En tout cas les heures passent et nous commençons à fatiguer un peu. Nous finissons par trouver la fameuse montée vers la terrasse. Aucune chance de la manquer : c’est l’endroit où il y a le plus de poteaux visibles (et de plantes piquantes invisibles…). Nous nous offrons une petite pause goûter sur le plateau en hauteur avec une vue superbe (bien qu’à contre-jour) sur le « Arrowsmith range » et la Cameron valley.
Nous estimons notre arrivée au refuge d’ici une heure et demi grand maximum et nous reprenons la marche. Une petite descente bien raide (ça fait toujours plaisir) pour retrouver le lit de la rivière et nous poursuivons notre route de cairns en cairns.
Sur la carte nous sommes désormais tout proche mais nous nous rendons vite compte que nous allons contourner une colline et arriver par derrière le refuge en remontant tout un lit de rivière asséché. Le jour tombe, la lumière baisse et nos jambes fatiguent sérieusement. Enfin, après un dernier effort en nous hissant en haut d’une petite butte, le refuge est en vue, dans un cadre superbe.
Encaissé dans un paysage désolé de moraines, entre la Cameron valley, des sommets à l’apparence quasi volcaniques et les pics déchiquetés de l’Arrowsmith range, la vue est saisissante. Nous arrivons sur les coups de 18h, heure du coucher du soleil, timing parfait on vous dit ! Par contre, pour les 5 heures de marche annoncées, nous n’avons pas tout à fait respecté le timing, qui est sacrément optimiste (même sans tenir compte de notre petite disgression matinale). Quand nous arrivons, il y a comme prévu deux autres personnes au refuge, un homme et une femme, parties et arrivées quinze minutes avant nous. Ils sont plus chargés que nous par contre et sont équipés pour la séance d’alpinisme qu’ils prévoient le lendemain. Leur programme : lever 4h, départ 5h, ascension du Mt Arrowsmith (2781m), retour au refuge à 12h et retour au parking dans la foulée… Des grands malades !
Pendant qu’ils réparent la radio (oui, en plus des crampons, piolets, cordes et casque, le gars transportait une perceuse pour réparer la radio…) nous faisons une petite partie de jeu de société en mangeant une soupe horrible à la tomate (reliquat des dons que Beef et Etienne nous ont fait à leur départ, merci les gars). Et finalement, nous renonçons à faire semblant d’attendre une heure décente pour dîner et préparons le repas. C’est là que je réalise que la quantité de polenta était peut-être très légérement surdosée. Mais nos estomacs en viennent néanmoins à bout sans faiblir, preuve de l’effort fourni dans la journée…
Pour une fois, ce refuge n’est pas tenu par le DOC (Department of Conservation) mais par le club d’alpinisme du Canterbury, ce qui explique la présence d’une radio. Tous les soirs à 19h30, le bulletin météo est émis et les randonneurs peuvent transmettre des informations, ce que font nos compagnons.
Après avoir passé environ 15 minutes à chercher ma lampe frontale que j’étais sûre d’avoir emmenée, je laisse tomber et j’accepte la lampe de poche de Victor pour lire mon Kindle… qui a décidé de rendre l’âme (il a du recevoir un choc pendant la rando, je ne sais pas comment). Le sort s’acharne, inutile de lutter, donc après être sortie admirer le magnifique ciel étoilé et avoir lu deux lignes d’un magazine qui trainait, je me couche à 21h. Victor ne tarde pas non plus, après avoir fait un boucan de tous les diables, effrayé par un papillon de nuit.
4h du matin, le réveil de nos colocataires sonne. Le temps de mettre mes boules Quies et un masque, je suis déjà rendormie.
6h du matin, pause pipi sous la Voie Lactée (oui, je suis poète à mes heures perdues)
7h du matin, notre réveil sonne pour profiter du lever du soleil.
Nous prenons notre petit-déjeuner en admirant le spectacle puis nous rangeons nos affaires (tiens, ma lampe frontale était dans la poche que j’ai vidé trois fois hier) avant de partir pour une petite exploration des environs sur les coups de 8h.
Nous prenons un peu de hauteur pour voir de plus près Cameron glacier et partageons notre point de vue avec deux keas curieux et (preuve de l’isolement des lieux) non bagués.
Apparemment il est aussi possible de voir des tahrs, sorte de bouquetins de l’Himalaya mais nous n’en verrons que les empreintes au bord de la rivière. Nous ne nous lassons pas de la vue sur les glaciers et Victor insiste pour grimper le pierrier.
C’est vrai que la vue est plus belle, et la descente moins pire que prévue.
Finalement, nous redescendons vers le refuge et nous mettons en route pour le retour à 10h30. Nous trouvons le chemin un peu plus facilement cette fois, mais nous nous émerveillons néanmoins de notre capacité à le perdre (en même temps il disparaît très régulièrement pour réapparaître 50 mètres plus loin comme si de rien était alors que nous avons lutté dans les cactus ou dans la boue pour le retrouver).
La marche s’étire en longueur et nous passons en mode « automatique » : ce moment où les jambes se mettent mécaniquement l’une devant l’autre alors que le cerveau a décidé de se déconnecter de l’effort.
Finalement, après de longues heures de marche, la vallée s’élargit et après un dernier effort, la vision de la carlingue de notre voiture nous emplit de joie !
Il est 17h et nous avons fait une bonne journée de 9 heures. Pour nous accueillir, toute une nuée de sandflies nous fait la fête.
Courageusement, Victor prend le volant pendant que j’étends mes jambes qui ne me portent plus vraiment. Nous arrivons chez nous, lessivés. Pas le courage de faire à manger alors nous passons chercher un « indian take away »avant de rentrer. Au final, nous avons marché 37km dans le week-end, ce qui n’est pas si énorme, surtout qu’il y avait peu de denivellé, mais le terrain et la recherche du chemin nous ont complètement épuisés. Je me couche à 21h en ayant l’impression que je ne serai jamais reposée le lendemain matin !
Vous n’étiez pas chauds pour faire le glacier vous aussi ? Vous avez un super entrainement de « montagne à vache », il faut passer à l’étape supérieure, maintenant ! En vrai oui, il faut effectivement se lever à 4h du mat, mais c’est quand même sacrément cool ! Avec Pascalou on est partants pour vous emmener faire une course (c’est comme ça qu’on dit) si ça vous branche !
Sinon la balade avait l’air chouette… moi j’aime pas trop quand il n’y a pas de chemin alors je compatis.
PS: en effet, les edelweiss ne ressemblent pas du tout à ça, leurs pétales sont un peu duveteuses…
On n’avait ni le matos, ni l’expérience, ni le temps pour le glacier.
Mais à l’occasion, sur un glacier d’accès facile, je retiens votre proposition 😀 (mais attention, je flippe très vite moi dans la pente en descente moi, souvenez-vous du ski de rando :p !)
Je suis super chaud pour faire de la grimpette sur un glacier, mais là il nous aurait fallu plus de temps (et un minimum de matos). L’idéal aurait été d’avoir un troisième jour, comme ça on aurait fait la grimpette le 2ème jour, et le retour le lendemain. Vu l’état dans lequel j’ai fini ma journée, je pense pas que j’aurais pu accumuler les deux dans la même journée.
Bref, quand vous voulez pour la course :p
Alors on fera ça à l’occasion (mais je vais pas m’avancer à promettre une date, par contre !)
Jolis paysages de haute montagne sinon !